collections du musée des beaux-arts de dijon
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Ugolin
Dessin
Rome , 1860
Auteur : Carpeaux, Jean-BaptisteJean-Baptiste CarpeauxDessin à la plume, encre de chine sur papier
Valenciennes , 1827 - Courbevoie , 1875
Ecole Française Digne héritier de François Rude (1784-1855) et de Francisque Duret (1804-1865), dont il fut l'élève, Jean-Baptiste Carpeaux réalise un oeuvre tout empreint de romantisme académique. A la beauté de la plastique néoclassique des corps sculptés s'allie la force de l'expression. Alors qu'il obtient le Prix de Rome en 1856, il se révèle peu intéressé par les beautés figées de l'Antiquité qu'il doit étudier, mais il s'enthousiasme devant la terribilità de Michel-Ange (1475-1564) et les compositions instables et tourbillonnantes du Bernin (1598-1680). Fort de ces leçons, il parvient à rendre à ses modèles une vive intensité psychologique qui n'est pas sans évoquer aussi l'art intimiste du XVIIIe siècle.
Issu d'un milieu très modeste, Carpeaux parvient par ce génie que lui reconnaissait Auguste Rodin (1840-1917), à s'élever dans les plus hautes sphères de la société du Second Empire. Et par les hautes protections dont il bénéficiait, telles celles de l'empereur et de la princesse Mathilde, il reçut des commandes prestigieuses dont la plus fameuse reste celle de "La Danse" de l'Opéra de Paris en 1865.
Hauteur : 28 cm ; Largeur : 28,5 cm
Inv. DG 686 Ce dessin se rapporte à la nombreuse série des études de Carpeaux pour le groupe d'"Ugolin", qui, achevé après bien des péripéties, a constitué son envoi de Rome de dernière année à un moment où l'artiste n'était plus pensionnaire. Le thème d'Ugolin, que Prud'hon et Delacroix avaient déjà traité et qui sera repris par Rodin, est emprunté à la "Divine Comédie" de Dante, au chant 33 de l'"Enfer". Carpeaux l'aurait découvert, selon certains auteurs, grâce au graveur Joseph Soumy (1831 - 1863) qui fut pensionnaire à Rome de 1855 à 1859 et l'a initié à la gravure. Le comte Ugolin della Gherardesca, du parti gibelin, tyran de Pise au XIIIe siècle, est condamné par son rival l'archevêque Ubaldini à mourir de faim avec ses enfants et petits-enfants dans la tour de Guslandi. Carpeaux dans une lettre du 18 septembre 1858 écrit à Jean-Baptiste Foucart : "Je me sens de force à travailler et je vais bientôt commencer mon dernier envoi. Ugolin, chant XXXIII, Enfer de Dante : "Quand j'eus reconnu mon propre aspect sur leurs quatre visages, je me mordis les deux mains de douleur, et mes enfants croyant que c'était de faim se levèrent tout à coup disant : O Père ! il nous sera moins douloureux si tu manges de nous, etc.". Que dis-tu de ce choix ? Je te donnerai une esquisse de mon groupe à une prochaîne lettre (...)" (cité par André Mabille de Poncheville, "Carpeaux", Paris, 1925, p. 49). Carpeaux pense d'abord à un bas-relief et dès le 19 décembre 1857, il écrit à Charles-Laurent Darragon : "Mais ce qu'il y a de plus heureux encore, c'est que je viens de trouver ma composition de dernière année. C'est un groupe de quatre figures. Les éloges que j'ai reçus de cette composition me sont une preuve que je n'ai qu'à marcher sur cette donnée. Ce sujet est dramatique au dernier degré, il a une grande analogie avec le "Laocoon". Je vous en ferai un dessin dans ma prochaîne lettre..." (cité par Louise-Clément Carpeaux, "La vérité sur la vie et l'oeuvre de Jean-Baptiste Carpeaux", Paris, 1934, t. 1, p. 78). Le groupe sera monumental. Mais le directeur de l'Académie de France, le peintre Schnetz, lui oppose que le sujet doit être emprunté à l'Antiquité ou aux Ecritures et non à l'histoire moderne. Carpeaux persévère et parvient de surcroît à faire prolonger son séjour à Rome. Le plâtre du groupe est terminé en 1861 et rencontre immédiatement un grand succès, puis est exposé à Paris à l'Ecole des Beaux-Arts en février-mars 1862. Il sera coulé en bronze pour le Salon de 1863 et obtiendra une première médaille. Ce dessin, daté de 1860 et qui a pu être exécuté quelque temps auparavant, précède donc la réalisation définitive et montre un moment de l'élaboration du groupe encore proche du bas-relief dans la disposition des figures. Il y a déjà les quatre enfants, mais leur position n'est pas encore tout à fait déterminée, notamment celle de l'enfant qui entoure les jambes d'Ugolin : seul le garçon ici vu de dos conservera cette place et ce mouvement. Ugolin n'a pas encore une tête "à l'antique" : ses cheveux sont longs, une draperie recouvre son dos. Mais l'idée du groupe définitif est là, qui fait apparaître à la fois l'influence du "Laocoon" et, dans la puissance d'expression du sujet et des figures, celle de la "terribilità" michelangelesque. La sculpture de Carpeaux sera elle-même sans doute à l'origine du "Penseur" de Rodin. D'autres dessins pour l'"Ugolin" présentent une technique de hachures identiques à cette feuille, notamment deux pièces du Musée du Louvre, l'un montrant un enfant agenouillé proche de celui qui se trouve ici à gauche et l'autre présentant le groupe de face.
(Notice de Serge Lemoine extraite de l'ouvrage "Musée des Beaux-Arts de Dijon : Donation Granville : catalogue des peintures, dessins, estampes et sculptures, tome 1 : oeuvres réalisées avant 1900", Ville de Dijon, 1976) Historique : Collection Léo Coulon ; Collection Pierre et Kathleen Granville
Donation Pierre et Kathleen Granville, 1969 Oeuvres en lien : DG 723 Feuille d'études Inscriptions / marques :Bibliographie :signature / dédicace / date en bas à droite : "JBte Carpeaux
à mon ami Coulon.
1860.
Rome"Exposition :Lemoine (Serge), Musée des Beaux-Arts de Dijon : Donation Granville : catalogue des peintures, dessins, estampes et sculptures, tome 1 : oeuvres réalisées avant 1900, Ville de Dijon, 1976, n°35 p. 63, reprod. p. 62
Georgel (Pierre), Le Musée des Beaux-Arts de Dijon, Dijon, 1985
Rosenberg (Pierre), avec la contribution de Louis-Antoine Prat et Bruno Ferté, Passion for Drawing : Poussin to Cézanne, works from the Prat Collection, Art Services International, Alexandria, Virginia, 2004, p. 258, reprod.
Joseph (Wassili), "Technique et création. Le génie au bout des doigts. Chef-d'oeuvre Ugolin", Dossier de l'Art, n° 220, p. 34-37, repr. p. 34
© photo François JayPasseurs d'art : Hommage à Pierre et Kathleen Granville donateurs du musée des Beaux-Arts de Dijon, Dijon : Musée des Beaux-Arts, 18 novembre 2006 - 29 janvier 2007
Michel-Ange au siècle de Carpeaux, Valenciennes : Musée des Beaux-Arts, (16 mars - 1 juillet 2012) , fig.72 p .125
The Passions of Jean-Baptiste Carpeaux, New-York : The Metropolitan Museum of Art, 10 mars - 26 mai 2014 ; Paris : Musée d'Orsay, 23 juin - 28 septembre 2014 , Cat. 23 p. 316, p. 74, repr. p. 73