collections du musée des beaux-arts de dijon

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La Présentation de la Vierge au Temple

Panneau
1521
Proposition d'attribution : Guérard, Grégoire

Peinture à l'huile sur bois (chêne)
Trois traverses verticales parquetées, fil de bois vertical

Hauteur : 102 cm ; Largeur : 81 cm
Inv. CA 21

Le nombre des attributions proposées pour cette peinture, et parfois leur ambiguïté, en dénonce assez le caractère hybride. Entrée sous le nom de Pontormo, elle est considérée comme l'oeuvre d'un faible imitateur de cet artiste par Frederik Mortimer Clapp en 1916. Mais depuis que l'érudit dijonnais Henri Chabeuf a fait remarquer le caractère germanique de l'oeuvre, il n'a plus échappé aux commentateurs, et Walter Hugelshofer est même allé jusqu'à proposer le nom de Hans von Kulmbach.
C'est Michel Laclotte qui, le premier, a décelé, en 1965, la raison de cette orientation de la critique, en reconnaissant derrière la composition du tableau, mais en sens inverse, une gravure de Dürer appartenant à la suite de la "Vie de la Vierge" publiée en 1511. Le peintre a directement emprunté, en effet, certains motifs tels que l'arcade ouverte sur un paysage, au fond, et au premier plan le groupe de sainte Anne et Joachim, la Vierge adolescente à la longue chevelure ondulée gravissant les marches du temple, ainsi que le panier plein de pains, au premier plan. Mais tout en identifiant cette source allemande, Michel Laclotte a restitué à un peintre travaillant en Bourgogne ce panneau, étranger dans son essence à l'art germanique.
L'artiste, en premier lieu, a délibérément simplifié la composition de Dürer en supprimant, par exemple, le groupe des marchands de gauche, sans doute jugé caricatural et accessoire, ainsi que la statue au-dessus de la porte. Cette figure énigmatique représente un chasseur accompagné de son chien qui tient dans sa gueule un oiseau. Interprétée comme Apollon vainqueur du dragon par Erwin Panofsky (traduction française, 1987, p. 162), elle évoque en tout cas, comme le décor des chapiteaux et des écoinçons d'arc dans l'estampe allemande, un paganisme meurtrier rejeté d'emblée par le peintre. Il se permet en revanche de laisser gambader des singes sur les tailloirs des piliers du Temple, où l'on distingue à peine, dans la pénombre, l'effigie de Moïse. Le cadre architectural est également modifié. Le recours à la perspective se limite à l'indispensable, et la composition se fonde sur des orthogonales. Le motif de la petite Marie franchissant les degrés vus de profil demeure, mais l'escalier qui conduit au grand-prêtre fait ici face au spectateur, privilégiant le caractère monumental du sanctuaire, et l'aspect décoratif des façades ornées de guirlandes. La peinture anversoise offre des exemples semblables, ainsi au revers d'un panneau anonyme conservé au Bode Museum de Berlin, où sont figurés deux saints (Friedlander, XI, 1974, pl. 69, fig. 69).
La mise en scène, qui isole l'adolescente dans un cadre architectural imposant, où elle est dominée par les hauts dignitaires ecclésiastiques, et sous les regards de l'assistance, ne manque pas d'intensité dramatique. L'artiste prend ses distances avec le modèle, où la Vierge se mêle au contraire à son entourage. Les silhouettes s'élancent, les physionomies s'adoucissent, et les femmes au long cou penchent leur tête, comme le font celles du panneau de l'hôpital de Cluny, baissant aussi leurs paupières qu'évoque à peine un trait de pinceau. Le luxe des détails fait oublier la rigueur géométrique de la composition. Vases, bucrânes, animaux affrontés et grotesques couvrent d'un fin réseau les piliers du Temple, tandis que le parement du parvis est sculpté d'une frise en bas-relief. Au réalisme de la cage et de la hotte à pains s'accorde l'éclat des tissus chamarrés, de la passementerie, de la chevelure enfantine qui s'éparpille en étincelles, et des vermillons alliés au brun mordoré ou des roses associées au bleu nuit.
Deux autres peintures dérivées de la planche de Dürer attestent son succès en Bourgogne. Cette gravure a inspiré le volet droit d'un triptyque provenant de Beaune maintenant conservé à l'église d'Auxey-Duresses, et une semi-grisaille au Musée des Beaux-Arts de Nancy.

(Notice de Marguerite Guillaume extraite de "La peinture en Bourgogne au XVIe siècle", Dijon, Musée des Beaux-Arts, 1990)

Historique : Collection Charles-Balthazar Févret de Saint-Mémin

Don Charles-Balthazar Févret de Saint-Mémin, 1823

Inscriptions / marques :

Bibliographie :

Exposition : © photo François Jay

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