collections du musée des beaux-arts de dijon

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Portrait d'un chevalier de Malte tenant le portrait du bailli de Hautefeuille, commandeur de l'Ordre.

Tableau
1788
Auteur : Vestier, Antoine

Peinture à l'huile sur toile
Hauteur : 102 cm ; Largeur : 83,5 cm
Inv. A 1

En 1788, lorsque Antoine Vestier peignit ce tableau, il était au sommet d'une carrière qui devait décliner avec la Révolution française, en raison de son attachement aux formules du portrait d'Ancien Régime et à une clientèle aristocratique. En 1785, il était entré à l'Académie royale de peinture et de sculpture, très soutenu par Joseph-Siffred Duplessis, portraitiste de Louis XVI, avec lequel il partageait le goût pour les effets de matières. Peut-être y eut-il, de la part de son mentor, la volonté d'affirmer, au sein de la prestigieuse institution, la position des artistes oeuvrant exclusivement dans ce genre inférieur mais lucratif, et dont la demande crût considérablement dans les années 1780. La signature "Vestier Pictor regis" traduit la fierté de cette reconnaissance officielle, alors que les académiciens portraitistes professionnels étaient rares. Vestier l'utilise à partir de 1787 pour les commandes très officielles de personnages bien en vue comme dans le portrait du "Baron de Doué" (1788, France, coll. part.), et, ce qui va souvent de pair, dans les tableaux présentés au Salon ("Jean Theurel", Salon de 1789, Tours, musée des Beaux-Arts). La référence au roi sert ainsi non seulement le peintre, lui conférant un prestige inégalé, mais aussi le commanditaire qui a recours, non à un banal portraitiste, mais à un académicien. On mesurera ainsi le jeu des signes sociaux inhérents au genre.
Les origines de la commande de ce tableau sont inconnues, mais de toute évidence, il s'agit d'un portrait de représentation, destiné à un usage probablement privé. Le portrait en médaillon, qui connut à partir des années 1770 une grande vogue, trouvait souvent sa place dans les intérieurs et les appartements aristocratiques. Vestier, dès le portrait de sa fille "Marie-Nicole Vestier" (1785, Buenos Aires, coll. part.), qui lui ouvrit les portes de l'Académie, prit quelquefois plaisir à représenter des portraits dans le portrait ("Madame Vestier", Salon de 1787, Paris, musée du Louvre). Il s'agissait là d'une tradition ancienne, qui connut son heure de gloire au XVIIe siècle, et permettait à l'artiste de faire montre de ses qualités picturales en soulignant la dimension illusionniste du genre. Dans ce cas précis, l'artifice, quelque peu archaïque, est utilisé avec une originalité qui souligne l'habileté du peintre à renouveler, avec naturel, les poncifs. Peut-être son voyage en Angleterre en 1776 le sensibilisa-t-il à une spontanéité plus grande de la pose, à moins de formalisme. Dans ce portrait, la figure principale, assise sur un fauteuil, prend directement à partie le spectateur et lui montre un autre médaillon, orné d'un très beau cadre Louis XVI à perles.
Si l'identité du modèle est inconnue, en revanche le personnage portraituré dans le médaillon peut être identifié, sans hésitation, avec Marie-Gabriel-Louis Texier d'Hautefeuille, commandeur de l'ordre de Malte depuis 1776, que Vestier avait peint en 1784 (localisation inconnue, Passez, n° 40). La figure principale porte, elle aussi, bien en évidence, la croix de l'ordre de Malte, tenue par un ruban noir. S'il ne s'agit pas là d'un portrait familial, il est fort probable, comme le suggère Anne-Marie Passez, qu'il avait une vocation commémorative, la figure principale rendant hommage au commandeur Texier d'Hautefeuille, dont la protection lui aurait permis d'entrer dans l'ordre. L'habileté de Vestier est alors de n'user que du langage de l'image, par le jeu d'un subtil illusionnisme, là où traditionnellement une inscription aurait dû célébrer l'événement.
Si le caractère relativement original de la pose peut avoir été influencé par l'art anglais, en revanche, tout dans le faire de Vestier trahit la marque du portrait français, tel qu'il se pratiquait dans les années 1780. La touche précise et lisse, qui laisse deviner le peintre en miniature qu'il fut, met en valeur le rendu des matières et leurs contrastes : les irisations du satin, l'éclat de la chemise, la surface réfléchissante du cadre doré. L'accord à la fois subtil et audacieux des couleurs (le bleu de l'habit de Texier d'Hautefeuille, le vert amarante de celui du modèle qui se détache sur un fond gris-bleu) donne à ce médaillon un chic propre aux dernières années de l'Ancien Régime.

(Notice de Sébastien Allard extraite de "Portraits publics portraits privés 1770 -1830", Paris, Londres, New York, 2006-2007)

Historique : Collection Comtesse d' Armandy

Don de la Comtesse d'Armandy, 1936

Inscriptions / marques :

Bibliographie :

Exposition : © photo François Jay

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