collections du musée des beaux-arts de dijon

résultats de recherche

ajouter au panier voir le panier


Le Christ au linceul

Tableau
vers 1639 / 1640
Auteur : Le Brun, Charles

Peinture à l'huile sur toile
Hauteur : 76 cm ; largeur : 155,8 cm
Inv. CA 493

"Le Christ mort" n'est signalé dans aucune des biographies anciennes du peintre, ni celle de Guillet de Saint-Georges ni celle de Claude Nivelon, mais a été attribué à Le Brun sur la base de critères stylistiques à partir de 1968. Le tableau est daté vers 1639-1640, donc avant le départ pour Rome en 1642. La restauration de la fin des années 1970 a révélé, outre une usure importante de la couche picturale, de nombreux repeints dans la partie supérieure du tableau, dissimulant une grande draperie bleue et une main soutenant le bras droit du Christ. Elle a ainsi permis de reconnaître dans le tableau actuel le résultat de la mutilation d'une "Pieta" ou d'une "Lamentation de la Vierge sur le Christ mort", qui entraîna d'importants repeints visant à "masquer l'état fragmentaire de l'oeuvre". L'apparence ancienne du tableau a été reconstituée grâce à un rapprochement avec une "Pieta" sur cuivre (collection privée) présentant un Christ très proche, en particulier pour la composition comparable de la main droite. La restauration du tableau de Dijon a ainsi simultanément conforté l'attribution à Le Brun et fourni une explication à l'évidence visuelle s'imposant au spectateur dans l'état antérieur : l'étrangeté manifeste de la main du Christ suspendue en l'air, gaucherie incompréhensible de la part de Le Brun, même à ses débuts. Le tableau impose donc au regard actuel un état vraisemblablement largement postérieur à la création, fruit de motivations inconnues.
Les choix opérés lors de la restauration ont rendu visible cette histoire du tableau : on aperçoit désormais à l'arrière-plan, au-dessus du panier à gauche, un pan de couleur bleue se fondant dans la pénombre du fond, et on distingue nettement, sous la main droite du Christ, un mouchoir et un doigt appartenant à la Vierge. Mais cette mise en évidence demeure suffisamment discrète pour que la cohérence esthétique du tableau reste préservée, en restituant "un état intermédiaire entre une usure excessive et l'ancien état maquillé par des repeints". La connaissance de l'état primitif de la composition modifie ensuite l'interprétation que l'histoire de l'art peut en donner. Certes, le tableau est toujours désigné comme un "Christ mort" ou "Christ au linceul", mais il apparaît désormais impossible de situer l'oeuvre dans la série assez courte des peintures représentant ce sujet, illustrée par le chef-d'oeuvre de Philippe de Champaigne ou par le tableau anonyme de l'église Saint-Médard à Paris. Si, comme c'est vraisemblable, Le Brun n'est responsable que de la "Pieta" et ne joua aucun rôle dans la transformation du tableau, la comparaison avec Champaigne tombe d'elle-même. Sur un plan iconographique, le rapprochement s'impose en revanche avec la "Pieta" du Louvre qui compta sans doute parmi les tableaux peints par le jeune peintre à Rome, vers 1643-1645, pour le chancelier Séguier ; d'un point de vue stylistique, en revanche, l'écart entre les deux oeuvres est frappant, le tableau romain témoignant d'une plus grande maîtrise dans la représentation de l'anatomie, dans l'expression et dans l'usage du clair-obscur.

(Extrait de l'ouvrage publié sous la direction de Pierre-Yves Kairis, Béatrice Sarrazin et François Trémolières, "La restauration des peintures et des sculptures . Connaissance et reconnaissance de l'oeuvre", Paris , Armand Colin , 2012)

Historique : Collection Paris, église indéterminée ; Collection Musée du Louvre, Paris

Dépôt de l'Etat de 1803, transfert définitif de propriété à la Ville de Dijon, arrêté du Ministre de la Culture du 15 septembre 2010

Bibliographie :

Exposition : © photo François Jay

powered by Mobydoc