collections du musée des beaux-arts de dijon
résultats de recherche
ajouter au panier voir le panier
Soranus et Servilie
Tableau
1793
Auteur : Gagneraux, BénigneBénigne GagnerauxPeinture à l'huile sur toile
Dijon , 1756 - Florence , 1795
Ecole Française Bénigne Gagneraux est l’élève de François Devosge à l’Ecole de Dessin de Dijon de 1767 à 1776, date à laquelle il part à Rome aux frais de la province de Bourgogne.
Après des débuts difficiles, il obtient ses premiers succès grâce à sa composition de 1784, "Oedipe aveugle recommande sa famille aux dieux", que Gustav III de Suède lui achète, marquant là le début d’une grande faveur auprès de l’élite européenne alors présente à Rome. Il obtient dès lors une réputation à la mesure de sa clientèle tant romaine qu’étrangère : suédoise, mais aussi portugaise, suisse, enfin française, comble pour lui qui n’est jamais allé à Paris.
Si Goethe le classait parmi les artistes auxquels la France doit son extraordinaire réputation, au même titre que Desmarais ou Saint-Ours ("Italienische Reise", vol. III), il appartient pleinement au milieu culturel romain. Rome où se côtoient alors Füssli, Sergel, Canova, Batoni, Kaufmann ou encore David.
(Notice d'Emmanuel Starcky, 2000)
Hauteur : 84 cm ; Largeur : 116 cm
Inv. CA 295 La condamnation de Barca Soranus - richissime gouverneur de l'Asie Mineure dont Néron convoitait la fortune, - et de sa fille Servilie qui, devant l'accusation avait prédit à l'empereur une mort violente, fait le sujet de ce tableau. Sujet tiré des "Annales" de Tacite (XVI, 21-32) et unique semble-t-il dans l'histoire de la peinture, où l'on voit le père et la fille rivaliser de générosité, chacun voulant sauver l'autre en se reconnaissant seul coupable. Deux licteurs les séparent dans leurs effusions, tandis que le Sénat et le peuple manifestent les sentiments divers que leur inspire le jugement inique et le sublime dévouement des victimes.
Sans doute faut-il, avec Birgitta Sandström, y voir une allusion à la situation des filles de Louis XV condamnées à l'exil, à l'heure où l'on jugeait leur neveu, le roi de France, exécuté à l'époque même où Gagneraux achevait son oeuvre. Mais s'en souvenait-on en 1798, quand le tableau valut à son auteur l'hommage posthume d'une célébration au Champ-de-Mars ? Un an plus tard seulement, "Le Retour de Marcus Sextus" de Guérin suscitait au Salon l'émotion que l'on sait en faveur des royalistes exilés...
Gagneraux n'aborda que rarement la grande peinture d'histoire : en dehors des deux batailles qui relèvent d'un genre spécifique, on ne compte guère que l'"Oedipe" de 1784 et les "Vestales" en 1794. C'est ici son oeuvre la plus ambitieuse, groupant trente-sept figures autour d'un drame qui met en jeu plus le "fatum", le destin voulu par les dieux comme pour Oedipe, ni le dévouement d'un Métellus à la cause commune, mais la "pietas", l'amour filial réciproque, exemplifié par l'épreuve reçue d'un pouvoir aveugle. Si l'on considère que la scène devait être agrandie à l'échelle humaine, dans un grand tableau qui comme beaucoup d'autres, à la même époque, ne fut jamais réalisé, force est de convenir que l'artiste, alors pleinement reconnu comme excellent peintre de sujets mythologiques et gracieux, jouait ici sa carrière. Non sans risque. Depuis que l'exemple fulgurant de David avait, pour la première fois depuis Le Caravage, rendu évidentes les conditions essentielles d'efficacité de la grande peinture d'histoire : dimensions réelles, clarté du propos, rigueur du dessin, combien de tentatives s'étaient révélées malheureuses, voire ridicules ; combien aussi de grands projets avaient tourné court ! Ainsi, en septembre 1778, deux ans après l'arrivée de Gagneraux à Rome, Peyron y exposait à l'Académie de France l'esquisse de "Les jeunes Athéniens et Athéniennes tirent au sort pour être livrés au Minotaure" (tableau au Salon de 1783 ; Londres, Wellington Museum), et conserva longtemps l'espoir de la réaliser en grand : et même dans le format du "Repas chez Simon" de Véronèse, dont il aurait pris la place à Versailles... Or, c'est de ce tableau que dérive évidemment la composition de Gagneraux.
Si l'ascension professionnelle des figures de gauche à droite, les jeux subtils de clair-obscur du chef-d'oeuvre de Peyron ne s'y retrouvent pas, elle en reflète plusieurs idées dont la rencontre ne saurait être fortuite : cadre architectural avec colonnade à gauche, grande statue sur haut piédestal (deux dans le "Soranus" : l'"Athéna" Giustiniani surmontant un bas-relief en bronze avec la louve et les jumeaux, et la "Flore" Farnese), niche avec statue au fond à droite, dominant le tribunal où sont assis les juges, enfin la grande lumière centrée sur l'héroïne et qui délimite avec l'ombre une grande ligne brisée sur les murs fermant la scène.
A ce souvenir d'une oeuvre montrée quinze ans auparavant, d'autres, contemporaines, ont pu ajouter leur influence : c'est en 1791 que Lethière quitte Rome, après y avoir esquissé son "Brutus" et sa "Virginie" - autres projets de castes compositions réalisées plus tard (Salons de 1812 et 1831), et Girodet y peignait en 1792 son "Hippocrate refusant les présents d'Artaxerxes". Si Gagneraux - qui fit plus de scènes d'histoire antique qu'il n'y paraît actuellement, plusieurs étant perdues - n'a certes pas le souffle épique que réclament de tels sujets, s'il ne se départit guère ici de son faire minutieux, si l'étrange ronde des licteurs autour du groupe central renvoie à des modèles baroques, si le bas-relief - repris de l'Arc de Titus - contredit la courbe amorcée par l'abside, à droite, sa tentative dans le domaine du style sévère n'est pas sans mérite : plus qu'à ses contemporains, elle semble renvoyer, par son mélange de délicatesse et de grandeur, aux exemples d'un Le Sueur et plus encore d'un La Hyre.
(Notice de Sylvain Laveissière extraite de "Bénigne Gagneraux 1756- 1795, Un peintre bourguignon dans la Rome néo-classique" / "Un pittore francese nella Roma di Pio VI", Dijon, Rome, 1983) Historique : Collection Jean-Baptiste-Claude-Bénigne Gagnereaux Puiné
Commande de Mmes Victoire et Adélaïde de France en 1792 à Rome ; rapporté en France par Gagneraux Puiné, le frère de l'artiste en 1796. Acquis en 1842 de Gagneraux Puiné. Oeuvres en lien : 5053-f° 42 Étude de seau contenant des rouleaux Etude2015-4-1 Bénigne Gagneraux, Soranus et Servilie Oeuvre contemporaine inspirée par Inscriptions / marques :Bibliographie :signature "B. Gagneraux"
date "1793"
Exposition :Carion, Journal de la Côte-d'Or, 25 vendémaire de l'an 7 (1798), p. 35
Baudot (H.), Compte-rendu de l'exposition des produits des Beaux-Arts et de l'Industrie : année 1837, Dijon, 1838, p. 15
Notice des objets d'arts exposés au Musée de Dijon et catalogue général de tous ceux qui dépendent de cet établissement, Dijon, Victor Lagier, 1842, n° 42
Notice des objets d'art exposés au Musée de Dijon, Dijon, Lamarche, 1860, n° 59
Catalogue historique et descriptif du Musée de Dijon. Peintures, sculptures, dessins, antiquités, Dijon, Rabutôt imp., 1869, n° 64
Catalogue historique et descriptif du Musée de Dijon. Peintures - Sculptures - Dessins - Antiquités - Collection Trimolet, Dijon, 1883, n°295
Baudot (Henri), Eloge historique de Bénigne Gagneraux, Dijon, 1889, pp. 30, 36 et 43
Chabeuf (Henri), "Un diptyque du XVe siècle, L'Annonciation du musée de Dijon", Revue de l'art chrétien, Paris-Lille-Bruges-Bruxelles, t. LXIII, 1913, p.II-III
Chabeuf (Henri), "Bénigne Gagneraux 1756-1795", L'Illustré, Dijon, 18 avril 1914, p.244
Magnin (Jeanne), Picture in the Museum of Dijon, Dijon, 1914 (1915 sur la couverture), n°295 p.204 repr.
Magnin (Jeanne), La peinture au Musée de Dijon, Dijon, 1914 (1918 sur la couverture), n°295 p.204
Magnin (Jeanne), La peinture au Musée de Dijon, 3e éd. revue et complétée, Besançon, 1933, n°295 p.298-299 repr.
Quarré (Pierre) et Geiger (Monique), Musée des Beaux-Arts de Dijon. Catalogue des peintures françaises, Dijon, 1968, n°214
Laveissière (Sylvain), Dictionnaire des artistes et ouvriers d'art de Bourgogne, Paris : F. De Nobele, 1980, p.223
Sandström (B.), Bénigne Gagneraux 1756-1795. Education, inspiration, oeuvre. Thèse de doctorat dactylographiée, Stockholm, Université, 1981, n°23, fig.73
Laveissière (Sylvain), "Bénigne Gagneraux (1756 - 1795) un pittore francese nella Roma di Pio VI / Un peintre bourguignon dans la Rome néoclassique", catalogue de l'exposition, Rome-Dijon, 1983, n° 92 p. 163-166, repr. p. 165
L'Art des collections : Bicentenaire du Musée des Beaux-Arts de Dijon, Dijon : Musée des Beaux-Arts, (16 juin - 9 octobre 2000), Imprimerie Nationale, 2000, p.173 fig.1
Lamarre (Christine) et Laveissière (Sylvain)(comment. par), Les Prix de Rome des Etats de Bourgogne : Lettres à François Devosge, 1776-1792 ; par Bénigne Gagneraux, Charles-Alexandre Renaud, Jean-Claude Naigeon et al., Dijon : Musée des Beaux-Arts, 2003, p. 38,
Champion-Vallot (Lucile), Les Salons dijonnais de la Monarchie de Juillet au Second Empire, Mémoire de recherche (2ème année de 2ème cycle) de l'Ecole du Louvre sous la direction de Catherine Chevillot, 2008, 3 vol. (vol. 1, Mémoire ; vol. 2, Index des artistes ; vol. 3, Annexes), M 3, reprod. coul. p. XCIX
© photo François JaySalon de l'An VII, Paris, 1798
Société des Amis des Arts, Dijon, 1837 , (?)
Paris et les ateliers provinciaux au 18e siècle, Bordeaux : Musée des Beaux-Arts, 1958 , n° 76
Une école provinciale de dessin au XVIIIe siècle : L'Académie de peinture et de sculpture de Dijon, Dijon : Musée des Beaux-Arts, 1961 , n° 106
Bénigne Gagneraux (1756 - 1795) un pittore francese nella Roma di Pio VI / Un peintre bourguignon dans la Rome néoclassique", Rome : Académie de France, Galerie Borghèse, avril-juin 1983 ; Dijon : Musée des Beaux-Arts, juillet-septembre 1983 , n° 92 p. 163-166, repr. p. 165
La Révolution française et l'école de la vertu antique, Montauban : Musée Ingres, 1989 , n° 60