collections du musée des beaux-arts de dijon

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Énée transportant Anchise

Tableau
17e siècle (2ème quart) / 17e siècle (3ème quart)
Auteur : Errard, Charles

Peinture à l'huile sur toile

Hauteur : 144 cm ; Largeur : 108,5 cm
(Toile ovale)
Inv. CA 257

Le siège de Troie est un des épisodes les plus célèbres de l'histoire grecque. Le personnage d'Enée est en effet revendiqué par nombre de familles européennes comme leur ancêtre. Son iconographie est abondante, et la scène qui le montre fuyant sa ville avec son fils Ascagne et son père Anchise sert de modèle de piété filiale.
On ignore la destination du tableau, apparemment en Bourgogne de longue date. Quel qu'en soit l'édifice, son installation en dessus-de-cheminée paraît toute désignée, associant l'âtre à la cité embrasée. Son attribution à Charles Errard ne fait aucun doute et elle a été acceptée par Emmanuel Coquery, qui travaille sur l'artiste, et par Pierre Rosenberg. L'attrait pour le costume à l'antique, Ascagne, sorte de jeune page, si proche de certaines figures gravées d'après ses dessins dans le "Breviarium romanum" publié en 1647, désignent bien le pinceau d'Errard. Les ombres du drapé de ce dernier et le paysage très italien, entre autres, rappellent le long séjour à Rome de quinze ans. On peut les rapprocher des peintures connues pour l'hôtel parisien du maréchal de la Ferté-Sennecterre (Bouxwiller et Cheltenham, Royaume-Uni), qui pourraient avoir été peintes vers la même époque et en France.
Ces références situent clairement le tableau dijonnais au moment de la mise au point de son style décoratif, au début de la carrière française (1643 - 1666). Il s'appuie sur une remarquable faculté à faire interagir format et disposition des personnages, qu'il transmettra à son élève Noël Coypel, et qui provient certainement de ses longues études sur l'antique. La technique du relevé pourrait l'avoir conduit à une esthétique de l'affleurement, les dispositions et la lumière jouant sur la mise en place dans la profondeur par rapport à la surface : il n'est que de souligner ici les virgules ponctuant la surface que constituent les jambes et les bras, éclairés franchement, des différents protagonistes.
Le souci d'emporter les "pénates" -effigie d'une divinité domestique-, ici la statuette que tient contre son visage Anchise, la solllicitude à l'égard du père et la descendance assurée par Ascagne, augurent de l'interprétation dynastique et de l'insistance sur la vertu de piété filiale. La vision de Bossuet est sans doute de plus grande ampleur, situant l'histoire à une époque riche en personnages remarquables, origine de cette descendance particulière porteuse de tant de fruits. Cet aspect double s'inscrit peut-être dans le renversement de conception du temps d'alors, la Renaissance et l'humanisme imposant graduellement l'idée de "progrès" en lieu et place du thème de la décadence depuis la Création et les personnages fabuleux (les Géants et les patriarches multicentenaires de la Bible, les dieux et les héros de la "Fable"...) ; ce que Michel-Ange, par exemple, avait inscrit à la voûte de la chapelle Sixtine comme une descente irrémédiable dans la matière, laissant au fidèle la possibilité visuelle du chemin inverse. Mais il n'est pas sûr que Bossuet ait vu d'un si bon oeil cette idée du "progrès" (si présente à partir du siècle suivant, dit des Lumières)...

(Notice de Sylvain Kerspern extraite de "Bossuet : Miroir du Grand Siècle", Meaux : Musée Bossuet, 3 avril - 1er août 2004)

Au musée en 1818. Date et mode d'entrée inconnus.

Bibliographie :

Exposition : © photo François Jay

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