collections du musée des beaux-arts de dijon
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Le Sauvetage des rescapés
Dessin
1818
Auteur : Géricault, ThéodoreThéodore GéricaultPlume et encre de Chine sur papier
Rouen , 1791 - Paris , 1824
Ecole Française Théodore Géricault commence sa formation de peintre à l'âge de dix-sept ans dans l'atelier de Carle Vernet (1758-1836) pour entrer deux ans plus tard dans celui de Pierre-Narcisse Guérin (1774-1833). D'un tempérament rebelle, il s'oppose vite à l'esprit classique enseigné. Ayant échoué au Prix de Rome, il fait à ses frais, en 1816, le traditionnel voyage dans la Ville Eternelle et recopie Michel-Ange (1475-1564), qui le fascine, et les maîtres anciens qu'il y découvre d'une façon très personnelle, signe déjà de son indépendance. Suivant les exigences de la vérité, Géricault puise son inspiration dans les faits contemporains et s'engage, avec la précision d'un anatomiste, dans la question de l'esclavage ou du scandale du naufrage de la Méduse qui donnera naissance, en 1819, à son oeuvre la plus fameuse et pour l'exactitude de laquelle il s'est appuyé sur l'observation directe de cadavres en décomposition. Un séjour de dix-huit mois en Angleterre et sa confrontation aux peintres d'Outre-Manche et de Constable en particulier, accentuent plus encore l'éveil de son objectivité face à ce qui l'entoure.
La composition, la couleur et la facture nerveuse du maître, inspirées de Pierre-Paul Rubens (1577-1640), Caravage (1570/71-1610), Diego Vélasquez (1599-1660), Rembrandt (1606-1669) ou Antoon Van Dyck (1599-1641) dont il fait de nombreuses copies, sont au service d'un romantisme naissant où s'exprime de façon spectaculaire la puissance de mouvement des chevaux ou la tension d'un drame.
Hauteur : 19,5 cm ; Largeur : 28,6 cm
Inv. DG 574 Ce dessin de Géricault se rapporte au tableau "Le Radeau de la Méduse", présenté au Salon de 1819 et conservé au Musée du Louvre. L'histoire à laquelle l'artiste fait allusion est connue : en 1816, la frégate "La Méduse" sombre au large du Sénégal. Le capitaine et les officiers embarquent dans le canot de sauvetage où les places sont limitées, les cent cinquante passagers et membres d'équipage restant montent sur un radeau attaché au canot dont l'amarre sera rompue par le capitaine. Le radeau dérivera treize jours pendant lesquels les scènes les plus atroces se dérouleront, dont une mutinerie et des actes de cannibalisme. Quinze survivants seulement seront recueillis par le navire "L'Argus". Géricault décide au printemps de 1818 de consacrer un grand tableau à cette affaire et en cherche l'épisode le plus significatif : mutinerie sur le radeau, scène de cannibalisme, apparition de "L'Argus" ou sauvetage des rescapés. Il semble qu'il ait d'abord songé à cette dernière possibilité : c'est l'épisode qu'il a figuré dans le présent dessin, dont il existe une autre étude (Paris, coll. part., anc. coll Dubaut) où les embarcations sont vues de trois quarts arrière gauche, en plongée, avec les survivants qui montent dans le canot. Ici, la barque de sauvetage de "L'Argus" est au premier plan, vue de côté et ses marins aident les rescapés à monter dans l'esquif. Lorenz Eitner (1972) remarquait que cette composition était assez proche de "L'Embarquement de la Duchesse d'Angoulême" que le baron Gros avait présenté au Salon de 1819, en même temps que le tableau de Géricault. C'est peut-être une coïncidence, mais il n'est pas exclu que Géricault ait pu voir le tableau de Gros dans l'atelier pendant l'exécution. Ce beau dessin au trait, où la manière "antique" de l'artiste reste très sensible, est donc à dater de la première moitié de 1818.
Sylvain Laveissière (1991-92), sans pour autant remettre en cause l'hypothèse d'Eitner, y voit aussi d'autres analogies : "Etrangement, mais le cas n'est pas isolé, ce dessin n'est pas catalogué par Clément, qui l'a pourtant reproduit dans son étude en 1867. La scène, au premier plan de laquelle est le canot de sauvetage envoyé par l'Argus, avec son rameur de dos, renvoie à maintes compositions faisant intervenir un embarquement ("Ariane abandonnée", "L'Enlèvement d'Hélène", "Renaud quittant Armide"...), telles que les a conçues la peinture maniériste des XVIe et XVIIe siècle, de Primatice à Dubois (...) On trouve déjà, à l'extrême gauche, le personnage aux bras levés et aux mains jointes qui apparaît en sens inverse dans la Mutinerie." Un dessin, également intitulé "Le Sauvetage des rescapés" et conservé à l'Art Institute de Chicago (inv. 1973.721), représente le canot de sauvetage sous un autre point de vue qui privilégie ici l'un des rescapés vu de dos et se précipitant dans les bras de son sauveur.
(Sophie Barthélémy d'après Serge Lemoine, "Musée des Beaux-Arts de Dijon : Donation Granville : catalogue des peintures, dessins, estampes et sculptures, tome 1 : oeuvres réalisées avant 1900", Ville de Dijon, 1976) Historique : Collection Aimé-Charles His de la Salle ; Collection Henri Delacroix ; Collection Pierre et Kathleen Granville
Donation Pierre et Kathleen Granville, 1969 Inscriptions / marques :Bibliographie :Marque de collection en bas à droite, marque de la collection His de la Salle (Lugt 1333)
Marque de collection en bas à gauche, marque de la collection Henri Delacroix (Lugt 838)
Exposition :Clément (Charles), "Géricault", Gazette des Beaux-Arts, t. XXII, Paris, 1867, reprod. en fac-similé p. 325
Eitner (Lorenz), "Géricault's Raft of the Medusa", Londres, 1972, n° 1 p. 139, reprod. pl. I
Lemoine (Serge), Musée des Beaux-Arts de Dijon : Donation Granville : catalogue des peintures, dessins, estampes et sculptures, tome 1 : oeuvres réalisées avant 1900, Ville de Dijon, 1976, n° 118, reprod.
Granville (Pierre), "Sublimation du fait divers dans la peinture de Géricault", Revue du Louvre, 4 -1987, reprod
Bazin (Germain), Theodore Gericault. Etude Critique et Catalogue Raisonne, T. VI, Paris, 1994, p. 108, n° 1947
© photo François JayDessins du Musée des Beaux-Arts de Dijon, Paris, Musée du Louvre, 13 février - 3 mai 1976 , n°38, reprod. p. 61
Géricault : La folie d'un monde, Lyon : Musée des Beaux-Arts, 2006 , n°104, p. 153 et cat. 86
L'Oeuvre du Mois : Bicentenaire du naufrage de la Méduse, Dijon : Musée des Beaux-Arts, juin 2016 (Rédaction fiche Rémi Cariel) , fig. 2